Acassan, bouillie cauchemardesque de mon enfance

Il est 3h00 pm. C’est l’heure que je redoute le plus. Mes camarades de garderie et moi  sommes convoqués pour la collation du jour. Le plateau garni de gobelets en plastique bleus ne présage rien de bon. J’anticipe la torture gustative à venir et j’en ai déjà les larmes aux yeux.

Je devine le contenu de ces gobelets et je suis dégoutée. Ils sont remplis d’acassan, notre bouille de maïs haïtienne.  J’aimerais pouvoir me cacher jusqu’à la fin de ce repas, ou même vider le contenu de mon verre dans une poubelle. Mais je sais qu’aucune de ces options n’est viable. Le personnel de la garderie me forcera à boire cette bouillie que cela me plaise ou non. D’ailleurs, il est absolument interdit de jeter ou gaspiller la nourriture.

Je n’aime pas du tout cette bouillie de maïs. Elle est froide et pleine de grumeaux qui n’ont pas fondu durant la cuisson. Ils sont difficiles à avaler et surtout à mâcher. Sans compter les particules noires dont je n’aime pas la sensation sur la langue. J’aimerais pouvoir les cracher, ce qui est impossible. Ces points noirs, qui ne sont autres que des épices douces en poudre, font partie intégrante de cette bouillie. Ils sont censés rehausser cette bouillie, mais je ne le sais pas encore à ce si jeune âge…

Acassan, this Haitian corn porridge is a local breakfast staple many, except me, enjoy. Read this food story on the blog | tchakayiti.com

Tels sont mes premiers souvenirs de cette bouillie de maïs haïtienne.

Trente ans plus tard, ils me hantent encore. Je n’arrive toujours pas à apprécier notre akasan.

Mon père en prépare religieusement. J’en suis émerveillée. Il peut passer une semaine entière à manger cette bouillie tous les jours au petit-déjeuner. Il achète la base au gallon des vendeurs de rue du quartier. Ces gallons sont remplis d’eau et d’un dépôt de mélange de maïs pouvant durer des semaines. Il sait comment l’utiliser. Il est devenu un pro de la préparation d’acassan.

Son akasan sur le feu dégage une odeur qui imprègne la maison entière. Il le rehausse de cannelle, d’anis étoilé, de muscade, de vanille et de pelure de citron vert. L’odeur de ces épices douces est alléchante, je ne saurais le nier.

Pourtant, je n’arrive toujours pas à déguster cette bouille de maïs. J’ai encore le goût de mon enfance sur la langue.

Je pense tout de même que ce jour viendra où je me réconcilierai avec cette bouillie. Pour en avoir goûté des années plus tard, je sais qu’elle peut être agréable.  Il faudra simplement que je la consomme chaude et épaisse avec juste assez de lait pour la rendre crémeuse. Je n’arriverai plus jamais à avaler un acassan froid et liquide.

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