Voyage au peyi des quenêpes…vous devez certainement vous demander de quel pays je parle. Mes articles en principe parlent de la gastronomie et de la cuisine haïtienne, donc pourquoi cette distinction ?
Quand je parle des quenêpes, Jacmel est la ville, ou le « peyi » qui me vient en tête. Pas nécessairement parce qu’elle est la ville principale des quenêpes, mais parce que je garde un souvenir particulier de celles que j’y ai dégusté lors de ma première visite.
Je devais avoir 9-10 ans lorsque nous partîmes à destination de cette ville. C’était la première fois que je laissais les limites de Port-au-Prince pour partir vers une ville de province. Ce trajet, je le fis debout à l’arrière de la voiture de mon père, les cheveux au vent. Une véritable aventure pour l’enfant que j’étais. Je ne me rappelle pas trop les détails de cette journée, mais j’en garde un précieux souvenir sucré.
C’est dans cette ville que j’ai découvert combien « la douce qui vient » – comme le crient aujourd’hui les vendeurs ambulants de Port-au-Prince pour annoncer leur arrivée – peut être charnue et sucrée. Je nous revoie en famille, sur la place principale de Jacmel achetant et dégustant un sachet rempli d’énormes quenêpes, comme je n’en avais jamais vues. Elles étaient grosses, charnues, juteuses, extrêmement sucrées et surtout fondantes. Il suffisait de les porter à la bouche pour que la pulpe jaune orangée se détache de la graine, ce qui n’est pas toujours le cas – la pulpe de ce fruit tend le plus souvent à s’attacher au noyau duquel elle ne se détache pas toujours facilement. Il faut sucer le noyau pour arriver à en ôter la chair complètement. Donc ces quenêpes fondantes étaient une grande découverte pour mon palais d’enfant. A noter que plus les quenêpes sont juteuses plus elles sont fondantes et qu’elles sont parfois sûres.
Ce jour-là, j’eus aussi l’agréable surprise de découvrir les quenêpes « marassa ». Ce terme s’utilise chez nous pour désigner les quenêpes à noyau scindé en deux, un phénomène qui se rencontre chez les quenêpes rondes et non celles qui sont de forme plutôt ovale. Mes frères et sœurs et moi étions enchantés par ce phénomène et aussi par le fait que chacun de ces noyaux avaient une face aplatie là où ils s’unissaient. Nul besoin de vous dire que débuta une véritable compétition à qui trouverait le plus de marassa et que les quenêpes furent par conséquent vite englouties.
Telle fut ma première aventure et rencontre avec la ville de Jacmel et ses quenêpes. Aujourd’hui, je suis encore fan de ce fruit qui se déguste durant le mois d’août, saison d’abondante récolte et durant laquelle ces fruits envahissent donc nos trottoirs. Nous en achetons autant que possible lorsque nous n’en recevons pas de fraichement cueillies de l’arbre d’un de nos proches ou amis.
J’avoue que j’en mange autant parce que je suis toujours à la recherche de celles qui seraient aussi délicieuses, juteuses et fondantes que celles que j’eus la joie de découvrir à Jacmel ce jour-là.