Connaissez-vous les oiseaux humains qui s’en prennent aux fraises?
Je vous ai déjà parlé de ces oiseaux réels contre lesquels nous menons constamment une guerre pour nos fruits. Je ne vous ai cependant pas mentionné qu’entre nous, membres de la famille, il existe aussi une guerre silencieuse.
Lorsqu’il s’agit des fruits de notre lakou lakay, c’est à qui sera le plus intelligent et cueillera le plus beau fruit de l’arbre avant les oiseaux et le reste de la maisonnée ! Cette guerre nous la menons surtout pour les arbres fruitiers qui ne produisent pas en abondance ou dont les fruits ne murissent pas tous en même temps. Je parle ici de notre prunier mesquin; de notre pêcher fantaisiste qui à chacune de ses récoltes ne nous gratifie que d’une ou deux magnifiques pêches plus grosses que les autres ; et aussi de ces fraisiers que mon père nous a ramenés il y a quelques mois.
La vue des ces fraisiers m’a immédiatement amenée à faire un voyage à travers le temps. Je me suis mise à penser à l’époque où nous avions ces petits « chouchous » dans notre cour.
J’utilise ici le mot « chouchou » parce que ces arbustes étaient comme des objets précieux pour ma sœur et mon père qui s’en étaient appropriés durant mon adolescence. Toute la maisonnée savait que les fraisiers appartenaient à ces deux qui en partageaient les fruits avec nous au gré de leurs fantaisies.
Interdiction d’y toucher sans leur consentement ! Quiconque souhaitait manger une fraise devait d’abord obtenir leur autorisation, à moins bien sûr d’en cueillir une à la dérobée, ce que je faisais assez souvent lorsque l’occasion se présentait.
A ces moments là, je devenais un peu comme ces oiseaux qui nous enlèvent les plus beaux fruits de notre cour, à la seule différence que, mes fraises, je les cueillais sans laisser de traces.
Malheureusement, certains insectes me devançaient assez souvent. Ils croquaient les plus beaux fruits et nous laissaient les restes accrochés aux branches, exactement comme les oiseaux le font avec d’autres fruits de notre cour.
C’est d’ailleurs l’une des raisons qui expliquent que nous ayons cessé d’en planter chez nous. Voyez-vous, les fraisiers sont très difficiles à entretenir. Lorsqu’on arrive à les garder en vie et qu’ils produisent de gros fruits, des insectes s’en accaparent avant même qu’ils arrivent complètement à maturité.
De guerre lasse contre les insectes, ma sœur et mon père avaient donc autrefois décidé d’abandonner. Ils ne récoltaient tout simplement pas assez de fraises pour continuer une guerre contre les insectes et les oiseaux humains que nous étions – ou que plutôt j’étais moi même.
A se demander pourquoi mon père en a ramenés dans notre cour. Oh les guerres que j’anticipe ! Surtout que rien ne semble avoir changé. Il y a quelques semaines, mon père me tendait un minuscule restant de fraise à goûter.
Il n’y a aucun doute. Comme jadis, il me faudra encore avoir recours à la ruse lorsque j’aimerai manger plus qu’un minuscule morceau de fraise. Souhaitons que les insectes m’en laissent quelques-unes!