Attention : cet article n’a absolument rien à voir avec les caramboles !
Je vous parlerai plutôt du sable sur lequel le fruit se prélasse. Cette séance de photo, à mon avis, n’est pas le fruit du hasard. Elle est empreinte de nostalgie et exprime mes sentiments et souhaits refoulés.
Voyez-vous, j’ai passé la majeure partie de cette séance avec un sentiment d’insatisfaction. Les photos, bien que belles, manquaient une touche particulière. J’étais sur le point d’abandonner lorsque brusquement je me mis à observer le fruit sous un nouvel angle. Je photographiais une étoile en plein été.
Quoi de mieux que de transformer la carambole en une étoile de mer jouant dans le sable.
J’ai instantanément attribué ce coup de génie à un élan de créativité. Cependant, je changeai d’avis au moment de l’editing. Je me rendis compte que cette séance de photo était en fait empreinte de nostalgie.
Ce set au thème marin me ramenait aux journées insouciantes passées à me prélasser sur nos plages haïtiennes en savourant du lambi boucané sans penser au lendemain. A l’époque, j’étais loin d’imaginer que ces moments de plaisir nous seraient volés et ne deviendraient que des souvenirs à chérir.
Cela fait plus de cinq ans que je n’ai pas plongé mon orteil dans les mers haïtiennes…
J’ai un vague à l’âme en pensant à ce temps révolu; ce temps où, vautrée dans un hamac à la plage, mes soucis semblaient se dissiper… Et je sais que d’autres partagent cette mélancolie. Pour nous qui sommes de Port-au-Prince, plus de trois années se sont écoulées depuis notre dernier séjour sur nos côtes. Un récent voyage sur une plage de Floride avec des amis haïtiens me l’a confirmé.
Debout dans l’eau, à mille et un lieux de notre côte natale, nous rêvions à haute voix de fruits de mer grillés dégustés au bord de l’eau, de plats chéris de notre enfance et de plats moins chéris.
Nous salivions tous à l’idée de déguster du lambi boucané qui aurait rendu cette journée à la mer parfaite. Notre conversation se tourna aussi vers d’autres plats nostalgiques ou tout simplement bizarres qui doivent être propres à notre culture culinaire. Nous parlions de kònfleks ak lèt, des cornflakes haïtiens, comme nous aimons à les appeler, et du lait ; de spaghetti ak òldòg, des pâtes servies à l’haïtienne avec des hot-dogs et une sauce épicée ; de labouyi, bouillies crémeuses et sucrées ; d’akasan, une bouillie de maïs onctueuse souvent dégustée au petit-déjeuner ; de toufe, un ragoût de légumes ; de accras, bouchées de malanga frites ; de pate kòde, pâte frite aujourd’hui farcie selon les goûts ; de marinades, beignets haïtiens salés ; de foie dur, foie de bœuf ; de boudin de porc… Autant de plats qui nous vinrent à l’esprit au fil de la conversation, des plats qui d’ailleurs méritent que je leur dédie à chacun une place sur le blog.
Mais aujourd’hui, attardons-nous plutôt sur la nostalgie gourmande qui nous envahit ce jour-là alors que nous nous retrouvions sur une plage étrangère à rêvasser d’un retour à notre mer des Caraïbes.
C’est cette même nostalgie qui laissa son empreinte sur ces photos de carambole. A les regarder, je ne peux m’empêcher de penser à la douleur profonde qui ronge ceux d’entre nous qui se retrouvent malgré eux loin de notre Haïti Chérie.
Et je rêve encore debout de finalement pouvoir faire un jour une trempette dans les eaux de mer de mon enfance…